1.13.2008

Sympathy for the Devil.


Ma détestation de moi-même culmine. J'ai l'impression d'être un exemple de lâcheté à montrer dans les écoles. Je regardais tout à l'heure ce reportage sur les jeunes qui à 15 ans, ont multiplié une poly-dépendance à 4 ou 5 drogues, ont perdu toute estime d'eux-mêmes et ne croient plus en leur potentiel. Oui, non, c'est exagéré mais enfin je leur ressemble quelque part. Ma façon de ne rien prendre en main, de me laisser aller. Encore bien loin de la liberté, on dirait.

J'ai presque voulu supprimer ce paragraphe en pensant que je pourrais être en train de travailler là, juste là, au lieu de perdre mon temps en appitoiement.

Je crois que c'est d'un docteur que j'ai besoin. Ou d'un psy, je sais pas. En tout cas, j'ai l'impression que je ne résoudrai jamais ce problème tout seul. Nan mais c'est pour vous dire, on atteint des sommets. Ca me fait mal de le reconnaître mais je ne fais même plus le minimum obligatoire. A croire que je le fais exprès. Je passe de plaisir en plaisir comme on passerait de cigarette en cigarette. J'en suis venu à me trouver bien de pas trop sécher à Sciences-Po, de lire des blogs politiques et de ne pas profiter du numéro de carte de mon frère enregistré sur l'ordinateur. Des actions somme toute bien naturelles propres à tout un chacun, c'est là que je mets ma fierté. Une lente chute de mes exigences envers moi-même, voilà ce à quoi se résument mes jours et mes nuits.

Et pourtant j'y crois.


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Pourquoi m'aimez-vous ? J'ai toujours pensé que pour être apprécié à long terme, il fallait progresser, devenir chaque jour un peu "plus" quelque chose. Les gens qui stagnent, on s'en lasse. Et pourtant, je ne suis pas encore seul. J'ai beau avoir beaucoup regardé The Truman Show, je ne peux pas me résoudre à croire que tout n'est que comédie. Est-ce que leur affection repose sur une vieille image qu'ils avaient de moi, une image toute cornée, floue mais à laquelle ils se raccrochent ? Je ne sais. Suis-je vraiment digne d'intérêt. Apporte-je (un jour, quelqu'un m'expliquera la règle des interrogatives à la première personne) vraiment un bénéfice concret aux quelques téméraires avec qui je passe du temps ?

J'ai trop ressassé ça dans ma tête, ça en devient de la bouillie. Je m'y perds un peu, dans cet embrouillis de fierté, de malaise, de joie et de sexe. Johanna se sent sale en partant de chez moi, moi je me sens sale en restant chez moi, voilà. Je ne trouve rien à dire, et ils me le font signaler, quand Emilio et Matthieu parle d'immigration. Parce que je n'y pense pas. Ca me passe au-dessus. Alors oui, je me prends de passion pour ça un jour, après un article qui m'a vraiment remué. Et puis ça se tasse. Et puis deux mois passent, et je n'ai plus rien. Des suites de petites passions comme des orgasmes masculins. Des petits jets veules, à peine entamés à peine achevés, comme la joie sale de voler un pauvre.

Mes idéaux sont intacts et pourtant, ils ne sont plus que prétextes à de beaux discours que je déballe aux gens que je viens de rencontrer. Ils ne m'entraînent plus. Ils sont bien là tous, comme une jolie collection soigneusement astiqués à intervalles réguliers. Il y a le bonheur, l'éternel bonheur, le bonheur de l'autre, de soi et la sensation de faire partie d'une humanité merveilleuse, le bonheur de l'illumination, de la lecture, du travail bien fait. Il y aussi l'amour, lui il ne bouge pas, fidèle au poste, l'amour de l'Autre mais de l'autre, celui qu'on tente de faire vivre du mieux qu'on peut sans jamais trop y arriver, celui qui tâtonne, à cheval entre l'amitié, le corps et l'admiration. Et puis il y a la transcendance, qu'on atteint à peine par moments, qui se défile, se dévoile et se referme, ce concept en forme de boîte de Pandore qui nous hante dès le moment où on en a entendu parler. Après dans l'ordre, vous trouvez l'épanouissement intellectuel, le respect, l'engagement politique, la responsabilité ou encore la foi.

Au juste, qu'est-ce que c'est que ces concepts que je manie comme des références savantes, sans en pénétrer le sens, jamais vraiment ? Je n'ai jamais été d'accord avec ceux qui voient en eux des mythes et je maintiens, je pencherais davantage pour des réalités accessibles à ceux qui savent s'en donner les moyens. On n'a pas Normale comme ça, il en va de même pour l'amour, le bonheur etc. Je suis sûr de mon coup, on se donne, on obtient. C'est sur cette logique évangélique que je base tout. Trois piliers : sincérité de l'engagement, respect de soi et volonté inébranlable. Appliquez à tous les concepts susnommés (ouh que c'est bon la pédanterie), secouez bien et vous obtiendrez un résultat sinon impeccable, mérité.

Toutes ces considérations ne résolvent en rien mon problème mais elles me donnent l'agréable illusion de progresser, avantage non négligeable.


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Comptez les "je" dans le texte.

1.10.2008

Le Journal d'un fou et autres nouvelles.


Je traînais sur le net, un term paper vaguement en souffrance, une nuit foutue et je suis tombé sur mon blog, que j'ai relu bien sûr. Puis de fil en aiguille, celui de T. puis celui de B. Son ancien, celui avec un fond rose. Plus ou moins consciemment, je cherche ce qui parle de moi. Enfin du moi de l'époque. Je tombe sur la rubrique Koala et Koalo. 4 articles seulement, que j'ai lu en partant de la fin. Au quatrième, j'ai laissé échappé une larme. Elle attend toujours, sur un coin de l'oeil, elle ne coulera pas, je pense. Ce serait déjà trop.


Ma vie n'est pas vraiment une histoire de larmes pourtant. Je n'ai jamais vraiment pleuré, vous savez. Quelques-une par-ci, par-là. Celle qui s'est échappée devant Casablanca, le moment où tout le monde chante La Marseillaise. Fibre patriotique ? L'autre fois, quand J. me fuit d'un seul coup, triste comme peut l'être une femme bafouée. Je claque la porte d'abord, furieux et m'enfouis sous mes couvertures et je les sens monter, ces pleurs amers. Alors je la suis en courant. En chaussettes. Je la retrouve 50m plus loin, en pleine rue Bonaparte, devant Cacharel, où était-ce MaxMara ? On ne sait pas quoi se dire, je devais avoir l'air faux sûrement, là, comme ça, dans le froid, à chuchoter des "mon amour". Puis je rentre chez moi et m'allume une cigarette.


Vous le voyez, je n'ai pas l'air d'un grand sentimental. Et pourtant, ça vit là-dedans. J'veux dire, je vibre toujours, "vibrionne" même comme dirait l'autre (moi en fait).


Je relisais B., donc. Et je comprenais enfin ces mots obscurs. Lipp, Deux Magots. Oui alors je me doutais bien, je vais pas vous jouer la comédie du provincial. Mais maintenant j'associais une image fringante dans mon imaginaire. Le Lipp, avec la chope de bière et les Deux Magots, juste en face de l'Eglise de Saint Germain des Près. Encore un bel exemple de ce monde que je commence à connaître un peu et auquel je pense souvent. Forcément quand vous habitez dans le 6ème, vous vous demandez un jour si vous serez comme ça, vous aussi, si vous ne l'êtes pas déjà.


J. m'a fait rire tout à l'heure, c'était les soldes et elle moquait gentiment tous ces gens heureux de sortir faire les magasins, heureux de consommer à moindre coût. La foule des grands jours rue de Rennes, les grands sacs à la main, l'air heureux. Même derrière le masque de détachement sûr de soi habituel, on pouvait le voir, ce bonheur simple. Alors ce serait ça ? Faut-il se moquer ou se réjouir des sentiments de ces gens ? Sont-ils simplets ou juste authentiques ? Pour la première fois mardi, un vêtement de marque m'a donné la furieuse envie d'être riche. Le début de la fin ?


Il est 7h, le réveil de la voisine sonne, strident.